Pinky la delphine qui se jetait contre un mur à l’Ocean Park
Pinky la delphine qui se jetait contre un mur du bassin à l’Ocean Park de Hong Kong voulait-elle se suicider ?
Au mois de mai 2013, ces images ont fait le tour du monde. Suicide ou pas suicide ?
Ce comportement est en tous cas complètement aberrant…
L’Ocean Park est un parc de loisirs familial situé à Wong Chuk Hang dans le district sud de Hong Kong.
Ouvert en 1977, il comprend aujourd’hui pas moins de 35 attractions, parmi lesquels un delphinarium, un centre de recherches et de reproduction pour mammifères marins, un aquarium et des montagnes russes. Ce parc a remporté plusieurs prix, dont notamment “The World’s Seventh Most Popular Amusement Park” et le « 33rd Most Visited Tourist Attractions in the World ».
Du point de vue des cétacés, le tableau est nettement moins festif.
L’Ocean Park enferme 11 Grands dauphins, dont 2 venus d’Afrique du Sud, et 10 dauphins de l’Indo-pacifique (Tursiops aduncus) d’origine « inconnue ». 3 dauphins seulement sont nés sont en captivité, certains par insémination artificielle, une opération réussie pour la toute première fois à Hong Kong en mai 2001.
37 dauphins sont morts dans les bassins du parc, ainsi que 13 pseudorques capturés à Taiji. Le parc a également reçu de la même source japonaise 5 globicéphales et pas moins de 16 dauphins à flancs blancs du Pacifique (Lagenorychus obliquidens). Tous sont morts, au terme d’une vie captive très courte.
En juillet 2012, l’Ocean park envisageait toujours l’importation de 30 nouveaux dauphins des Iles Salomon. Par contre, le projet d’importer des bélugas russes a pour sa part été abandonné.
Samuel Hung Ka-Yiu, président de la Hong Kong Dolphin Conservation Society, déclarait à la presse chinoise :
« Cet établissement devrait s’efforcer d’être plus transparent à propos des conditions de vie de ses captifs. Les dauphins libres vivent en moyenne entre 40 à 50 ans et le parc se vante souvent de ce que certains de ses détenus ont presque atteint cet âge. Mais la vraie question n’est pas tant de savoir jusqu’à quel âge un dauphin peut vivre, mais de quelle qualité est sa vie ! C’est cela qui nous préoccupe ».
Une préoccupation légitime, en effet.
Soucieux de démentir une fâcheuse information ternissant son image, l’Ocean Park a du beaucoup communiquer en cette fin du mois de mai 2013. Une vidéo nous montrait l’un des dauphins du Marine Mammal Breeding and Research Centre tentant de se suicider.
Les responsables du delphinarium assurent que l’animal se comportait de façon «normale ».
Largement propagée sur Facebook, les images sont pourtant explicites : Pinky, une delphine de l’Indo-Pacifique âgée de 14 ans, se jette bien avec violence contre la paroi du bassin.
Le parc a aussitôt rejeté toutes ces allégations de suicide ou de maltraitance à l’égard des dauphins.
«L’attribution de qualificatifs émotionnels humains aux comportements animaux n’est pas une façon correcte d’interpréter ou d’expliquer leurs actions. Le terme « tentative de suicide » n’a aucun sens dans le cas d’un dauphin. Ils sont bien trop stupides pour cela».
Comme le remarque le Dr Lori Marino, une fois encore, l’industrie de la captivité n’a de cesse que de disqualifier les prodigieuses capacités cognitives, sociales et émotionnelles des cétacés. Le suicide serait-il donc le dernier «propre de l’homme» en date ?
Courtney Vail rappelle tout de même que l’état mental des dauphins captifs est lamentable et que de tels comportements ne sont pas normaux.
Elle cite à ce propos quelques exemples :
* Au Miami Seaquarium, USA, en août 2000, “Pearl”, une femelle Tursiops est morte après avoir avalé un gobelet en plastique. Le registre fédéral Marine Mammal Inventory Reports (MMIR) indique que les décès par « ingestion d’objets » sont communs en bassin. Nami, une orque capturée à Taiji, est morte l’estomac plein de pièces de monnaie.
*Harley, un delphineau de 7 mois, captif du Minnesota Zoo, a sauté hors de son bassin en 2006 et en est mort peu après. Sa mère l’a suivi de peu dans le trépas.
* Cette vidéo met en exergue de graves troubles psychiques chez un dauphin captif. En liberté, ils ne s’échouent jamais complètement hors de l’eau, si ce n’est pour mourir. Ici, comme au Parc Astérix à Paris, c’est pour échapper à la foule des autres dauphins entassés dans un bassin minuscule. Les captifs de se delphinarium sont au bord du suicide.
* Deux cas récents : celui d’une fausse orque se jetant hors de son bassin au Churaumi Aquarium d’Okinawa en juillet 2010 – un « suicide » farouchement démenti par la presse japonaise avec ensemble ! – et celui de Rand, un dauphin Tursiops qui fit de même en juillet 2010 au Marineland, en Floride. En fait, le MMIR indique que ce comportement a provoqué plusieurs décès par le passé.
* Deux cas anciens : en août 1967, Marineland a finalement libéré Bimbo le globicéphale, après 8 ans de captivité. Bimbo avait agressé d’autres animaux et ses propres gardiens, il avait brisé une fenêtre d’observation et placé sous sédatifs. Le Dr. M.E. Webber, un médecin spécialisé dans les soins aux cétacés, a décrit Bimbo comme un «psychotique»
Corky, l’orque du même Marineland, a également brisé la fenêtre d’observation le séparant du public, ce qui a entraîné la perte de plus d’un tiers de l’eau du bassin.
Le parc a pourtant déclaré que le fait de se jeter contre un mur était chez Pinky une « habitude unique, certes, mais fréquente, qu’elle manifeste depuis qu’elle très jeune et qui ne lui a jamais causé de blessures jusqu’ici ».
Samuel Hung a reconnu pour sa part que le parc avait procédé à quelques légères améliorations au fil des ans, en ralentissant par exemple ses importations de dauphins sauvages, mais qu’il continuait à entretenir le goût du public pour les spectacles de cétacés.
«À la fin de la journée, peu importe ce qu’on a fait pour améliorer leur vie, ces dauphins se retrouvent tout de même privés de liberté dans le coin d’une piscine ».
Samuel Hung a cependant admis qu’il était difficile de déterminer si Pinky avait tenté ou non de se suicider – la séquence est très courte – mais il a souligné que des cas ont été documentés où les dauphins captifs en situation de stress extrêmes se blessent délibérément.
Par ailleurs, a déclaré Hung : «L’industrie de la captivité n’est guère transparente et ouvrent rarement ses dossiers médicaux pour nous informer de quelle manière sont morts la majorité de leurs dauphins captifs. De façon plus globale, le comportement des ces cétacés n’a que très peu à voir avec celui des dauphins libres… Je suis sûr que les cas d’automutilation surviennent bien plus souvent que nous ne le pensons ».
Depuis des années, les groupes de défense des animaux lancent des appels répétés au parc pour qu’il mette fin à son cirque aquatique, « qui livre au public une image déformée de la vraie vie de ces mammifères marins ».
Une fois encore, il a aussi été invité à réintroduire ses dauphins dans la nature.
La version chinoise de l’événement: « Les dauphins sont trop stupides que pour se suicider! » Le parc ment aussi en prétendant que Pinky est née en bassin
Quant à la tentative de suicide de Pinky, le mot de la fin revient comme toujours à Ric O’Barry, déclarant à propos de Cathy :
« J’ai vécu 7 ans avec elle. Elle s’est suicidée. Elle est morte dans mes bras et j’en ai fait l’expérience directe ».