Delphinariums : la menace chinoise

beluga-russes-chine2

Un enfant béluga capturé en Russie est transféré à l’Ocean Aquarium de Penglai en octobre 2014, et avec lui, deux autres mâles et sept femelles. October 29, 2014| Credits: ChinaFotoPress

Delphinariums : la menace chinoise

Lire aussi : 
8 mars, 2016

Chine : un nouveau cauchemar pour les dauphins et les baleines

 

Le 8 décembre 2015, la  (CCA) a publié un rapport sans précédent sur l’industrie des cétacés captifs  en Chine continentale.
Intitulé « A Look Inside China’s Growing Captive Cetacean Industry », ce rapport révèle  notamment la capture et l’importation de plus de 250 cétacés sauvages pour les parcs marins chinois depuis 2010.
« L’augmentation rapide du nombre de delphinariums associés à diverses attractions et projets de développement touristiques en Chine continentale est alarmante», a déclaré le Dr Naomi Rose, spécialiste des mammifères marins à l’Animal Welfare Institute. « Presque tous les cétacés exhibés en Chine ont été capturés dans la nature. A ce stade, la captivité ne nous pose plus seulement une question de bien-être, mais aussi de conservation d’espèces menacées ».

 

Kingdom-of-Poseidon-Photo-Copyright-2015-Gary-Goddard-Entertainment-All-Rights-Reserved

Le Royaume de Poseidon : un projet de delphinarium géant conçu pour 2016 avec le soutien de Disney


Le bien-être des cétacés captifs en Chine continentale est très préoccupant.

Les réglementations nationales que les installations doivent offrir des conditions d’accueil qui répondent à certains besoins physiologiques de base des animaux captifs,  mais ne mentionnent en rien les besoins comportementaux complexes de ces espèces intelligentes. Les conditions de vie dans les delphinariums sont largement insuffisantes pour y satisfaire.

En outre, déclare la CCA, « la participation de la Chine à la capture d’animaux libres dans les eaux russes et japonaises, ainsi que l’importation ultérieure de ces individus en Chine, menace l’état de conservation de certaines populations de cétacés particulièrement ciblées mais aussi l’image internationale d’un pays quant à sa capacité à protéger la faune sauvage « .

La CCA recommande que les autorités responsables de la gestion des cétacés en captivité en Chine adoptent plusieurs mesures, incluant l’interdiction d’exhiber des dauphins captifs dans un parc d’attraction.

 

China-Dolphins

Deux dauphins capturés à Taiji au Beijing Zoo, à Pékin.



À côté des 39 delphinariums déjà en fonction, 14 autres sont en projet dans le pays, ce qui indique le désir croissant du public chinois de voir des cétacés captifs, une nouveauté pour lui.

Fin 2015, l’un des plus grands parcs marins en cours de construction est le Shanghai Haichang Polar Ocean World. Le parc, qui doit s’ouvrir en 2017, est géré par Haichang Holdings Ltd.
Une fois qu’il sera opérationnel, le parc offrira une large gamme d’attractions, qui permettront au public de voir et d’interagir avec les mammifères marins. Le complexe comptera 12 salles à gradins pour les shows et 4  zones d’interaction animale. Les plans initiaux publiés en ligne incluent également le développement d’une «Arène des orques« .

Haichang Holdings exploite actuellement 5 des 39 delphinariums chinois, à Dalian, Qingdao, Tianjin, Wuhan et Chengdu.
La construction d’un sixième parc avec cétacés captifs par une seule et même société démontre la croissance rapide de cette industrie en Chine, et sa popularité auprès du public chinois.
En 2014, Haichang Holdings a noté que la fréquentation de ses parcs avait augmenté de 10,6% par rapport aux chiffres de 2013, estimé à 11.494.200 visiteurs.
Sur base de ces chiffres, les rapports relatifs au développement du Lianyungang World Park dans la ville de Lianyungang, province du Jiangsu, suggèrent que ce parc s’attend à faire venir deux millions de visiteurs par an.

 

shanghai-investitors

Des hommes d’affaires chinois posent la première pierre du gigantesque delphinarium de Shanghai qui enfermera des orques. Le projet est porté par Walt Disney Entreprises.

 


Les delphinariums chinois offrent toute une gamme d’activités pour leurs clients.
36 installations présentent des shows de cétacés.
20 font payer les visiteurs pour se faire photographier avec les dauphins et interagir avec eux en les touchant les serrant dans ses bras ou en lue r faisant des bisous.
15 installations offrent périodiquement des séances de « Dolphin Assisted Therapy ».
8 d’entre elles offrent aux visiteurs la chance de participer aux programmes de « Dresseur pour un jour ».
13 permettent de plonger avec les cétacés en scaphandre.  Elles organisent aussi des cérémonies de mariage sous l’eau et fournissent d’autres événements  de ce type à la demande.

Yangtze-finless-porpoises-in-an-aquarium_zpsc2eb2da4

Marsouin aptère ou marsouin sans nageoire du Yangste

491 cétacés environ sont maintenus en captivité dans 39 delphinariums chinois actuellement ouverts au public.
Ce nombre inclut 279 dauphins Tursiops, 114 bélugas, 38 marsouins aptères, 17 dauphins à flancs blancs du Pacifique, 16  dauphins tachetés du Pacifique, 10 dauphins de Risso, 7 pseudorques, 2 globicéphales et 1 dauphin à bosse de l’Indo-Pacifique.

Parmi les espèces de cétacés captifs en Chine, le marsouin aptère est le plus petit, tandis que le globicéphale est le plus grand.
Des informations fiables suggèrent que 7 orques ont été importées en Chine, mais aucune d’entre elles n’a encore été exhibée en public à la date du 25 décembre 2015.

Neuf des espèces de cétacés gardés captifs en Chine sont inscrites à l’Annexe II de la CITES, mais le marsouin aptère et le dauphin à bosse de l’Indo-Pacifique, extrêmement vulnérables, sont inscrits à l’Annexe I, qui prohibe en principe leur exploitation.On ne connaît que 9 naissances de cétacés captifs en Chine, dont 6 ont été mentionnées par les médias. Au Changsha Underwater World, un béluga est né en octobre 2014. L’enfant est mort au bout d’un mois, du fait de l’espace trop limité et de la surpopulation de son bassin, comme l’a confirmé une visite de l’installation en novembre 2014.

Au Qingdao Haichang Polar Ocean World, une fausse-orque est née en Juillet 2012. Elle exécute des shows avec sa mère en décembre 2015.
Enfin, le Fushun Royal Ocean World a pu se vanter d’une première mondiale en juillet 2011: la naissance d’un « wholphin », croisement entre un dauphin de Risso et un dauphin Tursiops, mais cet hybride n’a pas survécu.

wolphin

Wholphin

 

Trente-six des 39 installations présentent des spectacles de cétacés, accompagnés de musique forte.
Les shows présentent les animaux au public et lui montrent les tours qui leur ont été enseignés. Le commentateur évoque souvent des histoires légendaires.
Ainsi, pendant le spectacle des bélugas, ceux-ci sont décrits comme les montures  d’un prince humain, et les dauphins sont les compagnons du prince qui luttent à ses côtés contre un mauvais esprit pour sauver une sirène. Très peu d’informations scientifiques ou environnementales sont fournies pendant les shows.

chine-harbin-belugakisses

Harbin Pole Aquarium en janvier 2014


Beaucoup de commentaires pendant les spectacles fournissent des informations trompeuses.

Par exemple, le commentateur explique que les dauphins adorent faire ce qu’ils font et sont ravis de rencontrer plein de gens. Qu’ils sont heureux de quitter la mer pour vivre en captivité. Que dresseurs et dauphins forment une grande famille unie.
Et quand débute le spectacle, on raconte des histoires de princesse qui tombent amoureuse d’un prince transformé en dauphin, ou d’un Prince Béluga qui vole à la rescousse de sa fiancée humaine ou bien encore de ces pêcheurs secourus par des cétacés aux pouvoirs magiques.

baijing

Shanghai Changfeng Ocean World

Parmi les tours présentés au public, citons :
– Le remorquage d’un enfant dans un petit bateau gonflable tiré par des dauphins, des dauphins sautant par-dessus une corde tendue de plus en plus haut,  sautant travers des cerceaux ou résolvant des équations mathématiques en poussant sur une pédale pour indiquer un nombre, des dauphins nageant en arrière sur la caudale, le corps dressé (tail-walking), des dauphins et des bélugas saluant la foule ensemble avec leur caudale, vocalisant sur ordre, crachant de l’eau ou lançant des ballons, etc.
A ce niveau, il faut le reconnaître, les delphinariums chinois ne diffèrent guère du Parc Astérix ou du Boudewijn Seapark.

Les dimensions des bassins sont généralement de 6 mètres de profondeur, 15 de large et 20 de long. Les animaux sont rarement présentés dans des groupes naturels.
Le nombre des visiteurs dans les delphinariums chinois donnent le vertige : le seul Chimelong Ocean Park a  enregistré plus de 80.000 visiteurs le 22 Février. Cette foule est très bruyante, ce qui génère un stress intense chez les captifs.  La musique accompagnant les shows est diffusé à des niveaux atteignant les 110 dB, l’équivalent d’une scie sauteuse…


Lire le rapport complet 
A Look Inside China’s Growing Captive Cetacean Industry


chine-beluga-jump

Chimelong Ocean Park

L’effet Blackfish a sonné la fin inéluctable des delphinariums en Europe et aux USA.
Déjà, le Marineland d’Antibes aussi bien que SeaWorld préparent leur délocalisation vers Dubaï et l’Asie.
Le futur de l’Industrie de la Captivité se lève à l’Est.
La Chine est désormais son nouvel Eldorado !  


Lire aussi

Corée, Turquie, Japon, Russie : le futur des delphinariums est à l’Est